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Libérées : le combat féministe se gagne devant le panier de linge sale

J’aime beaucoup Titiou Lecoq. Pas juste parce qu’on partage le même nom de famille, mais aussi parce qu’elle écrit des trucs très chouettes. J’ai lu ses deux romans, Les Morues et La Théorie de la tartine. À l’époque (2011 et 2015), j’aimais déjà son approche féministe et son style d’écriture, son ton drôle et un poil cynique. J’ai ensuite suivi son travail de journaliste, notamment pour Slate et Libération.

À la sortie de « Libérées, le combat féministe se gagne devant le panier à linge sale », vous vous doutez bien que je me suis jetée dessus. En ressort une lecture vraiment enrichissante et un essai particulièrement bien construit.


– En commençant la lecture, je me suis rapidement identifiée à l’autrice et ce qu’elle nous raconte. Forcément: je suis une femme, je vis en couple et que je le veuille ou non, c’est pour l’instant moi qui gère le plus de choses dans notre appartement. Si mon copain s’occupe de beaucoup de choses: non, nous ne sommes malgré tout pas à égalité. Et quand Titiou parle des chaussettes qui traînent qui la rende folle, moi je pense aux miettes de pain du petit-déjeuner qui ne sont pas nettoyées sur la table.

– Autour de la vie à deux et des tâches ménagères, Titiou Lecoq aborde de nombreux sujets dont on parle de plus en plus ces dernières années: la charge mentale, la double journée… Tout cela est à la fois abreuvé du vécu de l’autrice, mais aussi d’études et de chiffres. J’aime cette double entrée: c’est à la fois très documenté, mais ce n’est pas juste un essai chiant et impersonnel: il y a toute l’expérience perso de Titiou, dans laquelle on peut se reconnaître dans de nombreux aspects.

– Mais il y a aussi une bonne partie historique qui décortique le pourquoi du comment: pourquoi les tâches ménagères reviennent principalement aux femmes, la division du travail sexuel, l’invention de la ménagère etc.. Si je commence à connaître de nombreux concepts féministes et que je m’intéresse à la charge mentale et autre, cette partie historique est vraiment intéressantes et m’a appris beaucoup !

– L’autrice ayant deux enfants, une grosse partie de l’ouvrage concerne la parentalité et au fait qu’encore une fois, l’éducation des enfants revient surtout à la mère. Je n’ai pas d’enfants et je ne souhaite pas en avoir mais j’ai quand même beaucoup aimé cette partie, rapport à ma propre expérience en tant qu’enfant et à l’éducation de mes parents, des différenciation entre mon frère et moi. Et puis, Titiou Lecoq ayant deux garçons, elle parle également des difficultés d’une éducation non-genrée. Bref, c’est une petite mine d’or avec de très bonnes pistes de réflexion qui devraient intéresser les parents et futurs parents.

liberees titiou lecoq

– En achetant ce livre, je pensais qu’on allait se cantonner à ce domaine du ménager, de l’éducation des enfants et autres. Mais pas du tout ! Titiou Lecoq brosse tout un tas d’autres sujets liés aux femmes.

  • J’ai aimé toute la partie sur Instagram, le culte de l’image et de l’intérieur parfait, de la femme/mère parfaite. Je ne m’étais jamais vraiment penchée sur cette question et ça m’a fait m’en poser plein d’autres et me pencher plus en profondeur sur le sujet.
  • On parle aussi de la place des femmes dans l’espace public, de la cour de récré à la rue. C’est un sujet qui m’intéresse beaucoup et que j’ai seulement commencé à conscientiser il y a 1-2 ans. L’espace public est masculin et la femme doit se faire la plus petite possible si elle veut un minimum y être acceptée. Évidemment on pense au manspreading, mais aussi au mobilier urbain et aux installations urbaines qui sont tout sauf pensées pour les femmes (et/ou les mères).
  • Il y a une partie qui s’intéresse au sac à main: pourquoi les femmes ont des sacs à mains et pas les hommes ? Oui on pense évidemment à toute la partie marketing mais ça ne vient pas que de là, et ça je n’y avais franchement jamais vraiment pensé. Les femmes doivent être parée à toute les situations et le sac à main et leur arme. Si je mets beaucoup de choses dans mon sac à main « au cas où » (et même le portefeuille de mon copain, qu’il ne veut pas se trimballer), ce chapitre m’a fait penser à ma mère. Dans son sac ? Absolument tout: maquillage pour une retouche, kit manucure si on se casse un ongle, petit gâteau et sucre pour une petite faim, parapluie, sacs en tissu pour des courses de dernière minute… Bref, on doit penser à tout et notre sac à main nous rassure. Quand Titiou parle du fait de sortir dans la rue sans son sac, les bras ballants: bah ouais, le peu de fois où je le fais, ça me fait franchement bizarre. Je me sens à nue, je ne sais pas quoi faire de mes mains, je me dis « mince j’aurais du prendre ça « au cas où ». Assez dingue non ?

Vous l’aurez compris, dans son ouvrage, Titiou Lecoq parle du quotidien des femmes, sous tous ces aspects. C’est riche mais jamais superficiel. Chaque point est détaillé, avec des exemples, des études, des expériences personnelles. Libérées, c’est définitivement un bouquin à mettre entre les mains de toutes les femmes. Il y a une réelle prise de conscience à avoir, vraiment.

Libérées, le combat féministe se gagne devant le panier de linge sale
De Titiou Lecoq, 17€ aux éditions Fayard
Suivez Titiou Lecoq sur Twitter et Instagram

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4 commentaires

  • Alessia
    12 juillet 2018 at 14 h 20 min

    Hello ! Je trouve ces réflexions intéressantes. Je ne suis pas d’accord avec toutes, mais c’est intéressant de voir se faufiler des pistes de réflexions, surtout par rapport aux installations urbaines.

    Par contre, je ne sais pas si c’est un truc de génération, mais mes amies et moi sortons peu avec de gros sacs remplis de choses « au cas où ». Le plus souvent, même, on sort avec nos clés, notre portable, et de la monnaie, rien d’autre, sans sac, et sans souci (ou alors, avec un micro-sac, car les poches sont dures à trouver dans les jupes ^^). Quand je prends des choses en plus, ce n’est pas pour me rassurer, mais dans une préoccupation plus budgétaire et/ou zéro déchet : je ne veux pas acheter de bouteille d’eau en plastique, je n’ai plus de sous sur mon compte alors j’emmène mon paracétamol avec moi quand je suis malade… ce que peut faire aussi mon homme ! Je pense aussi que c’est une question d’argent (money money money ^^) : on fait les poches des vêtements féminins minuscules, voire inexistantes, pour vendre le sac en plus (et les sacs à main sont souvent onéreux !), et je suis de plus en plus convaincue que nous sommes, en tant que femmes, entrées dans ce cercle vicieux de consommation (même si l’on s’en détache de plus en plus, bien évidemment). Par contre, je me doute qu’inconsciemment, certaines femmes sortent avec leur sac pour se rassurer (le sac de nos mamans, typiquement, oui)… C’est une question d’habitude ! Si ça te fait bizarre d’avoir les « bras ballants » quand tu te balades, ça passe vite une fois que tu prends le pli sans sac ^^

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    • anahaddict
      12 juillet 2018 at 14 h 42 min

      Merci pour ce commentaire ! C’est intéressant d’avoir ton expérience et ton point de vue 🙂 J’ai vu passer dernièrement un article plus explicatif concernant l’absence de poche ou des poches minuscules sur les vêtements féminins, il y a évidemment l’aspect marketing mais il y a aussi une explication historique, mais je n’arrive plus à retrouver le lien.. >< le point positif, c'est qu'il y a je trouve de plus en plus de marques (mais souvent indépendante ou assez chères) qui proposent des fringues avec de grandes poches sans que ça ne fasse moche sur les vêtements ^^

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  • Kimysmile
    18 juillet 2018 at 15 h 51 min

    Je bosse dans une bibliothèque et ta chronique me fait voir qu’il faut que je l’achète pour mes lecteurs ! 🙂

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    • anahaddict
      19 juillet 2018 at 10 h 23 min

      Oh trop chouette idée 🙂 il faut le mettre dans toutes les mains ^^

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